FBN - 12-13-14/04/2009 – HAKONE OU LOIC ET MATTHIAS AU PAYS DES VIEUX NIPPONS
Un voyage au Japon sans voir le mont Fuji , c'est un peu comme visiter Paris sans faire du bateau-mouche : immanquable . Donc on décide avec Loic de partir pour la station thermale d'Hakone , au sud de Tokyo , décrite par notre guide comme un bon point d'observation de la montagne sacrée avec de mythiques points de vue en miroir , depuis le lac Ashi en contrebas . Renseignements pris toutes les auberges bons marchés sont complètes et l'on doit se rabattre sur une demi-pension dans un hôtel en bord du lac, quelque peu onéreux à notre goût, mais réputé pour ses bains de sources chaudes naturelles , très courues dans la région .
Et c'est parti pour une journée qui sera en définitive consacrée principalement au transport . D'abord un train un peu poussif , et là constatation que la moyenne d'âge de notre entourage avoisine les 70 ans de moyenne . Fini les Harajaku girls sexy en mini-jupes et talons vertigineux , place aux chaussures compensés et aux grosses baskets de marches .
A Tokyo les retraités n'étaient pas trés visibles , noyés qu'ils étaient dans le mouvement des cols blancs et éclipsés par les personnalités extravagantes de certains jeunes .
Là tout est fait maintenant pour les fauteuils , et surtout pour éviter tout accident : car en définitif il faut bien rappeler que le Japon est un pays toujours plus vieux , avec une démographie en crise . Donc partout des rampes .
Après le premier train , un autre train moins rapide , puis un funiculaire , puis un téléphérique . A croire que l'on a recherché intentionnellement la décélération , par rapport à la folie de la Ville .
Ca n'en finit pas , le tout étant toujours plus lent : faut dire que ça monte sec ! Nos voisins en tout cas se complaisent bien dans ce temps ralenti .
Et après plusieurs heures depuis Tokyo on arrive enfin à l'hôtel en bord de lac , et trouvons notre première chambre de style japonais ( et non « western » comme ils disent) , c'est à dire avec un tatami , qui essuyera plusieurs fois mes chaussures interdites . Des futons en guise de lit , une table basse , et des Yakuta , sorte de kimonos en cotons en guise de robe de chambre pour se promener dans l'hôtel . Ambiance thermale .
Juste le temps d'aller à l'extérieur faire un petit tour du propriétaire avant le repas du soir annoncé pour 18 H !
Et à 18 heures , résonne dans notre chambre une voix nous informant certainement que le diner est servi : bienvenu à la maison de retraite ! Ca piétine pas mal dans le couloir . Nous on ne se presse pas , et on arrive comme une fleur , après le quart d'heure parisien , un peu plus tard . Sauf que l'on fait un peu tâche : premièrement tous sont déjà attablés, puis il n'y a que de vieux couples , et tous en yakuta . Bon, la direction semblait avoir prévu le coup puisqu'elle nous a installés un peu à l'écart et en retrait des autres … Rétrospectivement , cette attention doit être mise sur le compte de l'horreur des japonais pour les surprises ( ceci s'appliquant à toutes choses ) et les mises en difficultés . Au Japon personne ne doit gêner ou contrarier l'autre , tous vivent donc dans un monde codé et « harmonieux »où chacun doit trouver sa place . Et « l'Etranger » , par définition, est différent , et donc une source de problème potentiel . Donc on le surveille d'un oeil , et on le met à l'écart pour voir . En l'espèce, l'examen de passage semble avoir été concluant puisque le second soir nous étions au milieu des autres hôtes , nous-même ayant revêtus notre yakuta .
Le repas - cette fois je passe les détails - est une vraie merveille et certainement de la cuisine gastronomique , justifiant pleinement le prix de la chambre . Encore une fois c'est l'aventure culinaire, on ne sais jamais trop ce que l'on mange , animal ou végétal, algue , tofu ou pâtes de riz , mou, sucré , vinaigré, chaud ou froid , toute ces subtilités pour notre palais peu habitué se mélangent dans un tourbillon de saveurs .
Et à 19 H , le repas est fini , tous au lit : enfin c'est ce que semble dire la personne au micro …
Nous, on part se détendre aux bains japonais de sources chaudes : hommes et femmes séparés , tous ( enfin là on n'est que nous deux puisque les autres commencent à dormir ) se nettoyent ensemble, nus , dans la même salle, assis sur un tabouret , se rincent avec une bassine , puis vont se délasser dans l'eau venue des profondeurs de la Terre à plus de 40°C . Un vrai mode de vie .
Lendemain matin , rebelote , la voix mystérieuse nous annonce qu'il est 7 H ( « il est l'or , l'or de se réveiller ») puis 7H30, l'heure du petit déj ! Cette fois on ne traine pas . Un vrai buffet avec des algues , des légumes vinaigrés , des minuscules poissons bouillies servant de condiments, du thé vert, etc : chouette ! Loic s'étonne de mon appétit … Mais aujourd'hui c'est la journée rando autour d'Hakone !
Sauf que j'avais oublié que l'ensemble de la région avait été façonné à l'intention de ceux qui la parcourent.
Donc très peu de chemins de randos , et quand ils existent, ils sont aménagés en escalier tout du long , voir même bétonnés ( et sans doute balayés...) pour éviter tout glissement intempestif à cause d'une feuille en train de pourrir que la Nature aurait fait tomber par ici …
Donc , nous suivons le mouvement et les « must see » du coin : un tour en téléphérique pour voir les fumerolles volcaniques qui attirent surtout les amateurs d'oeuf de poules cuits dans l'eau bouillonante des sources sulfurées , et qui donne à la coquille une couleur noire . En sorte, des oeufs durs qui cuisent dans une odeur d'oeuf pourri . Y avait bien que les Japonais pour adorer cela : il y a foule sur le site escarpé et on double sur le chemin nombre de mamies soutenues par leur famille , toute cassée en deux par les années et sans doute par le dure labeur de leur vie paysanne à une époque d'immédiat après-guerre où le pays était plongé dans un grande misère . Monde révolu : aujourd'hui le pays est urbain, la richesse à peu près globalement bien répartie , et l'agriculture nationale a pratiquement disparu.
Cette visite ( et la suite du voyage ) m'a fait faire cette constatation qui a valeur de conclusion définitive : les japonais sont de vrais gros gourmands , et en tout lieu où l'on peut trouver de quoi manger , on les retrouve nombreux .
Ensuite, une petite traversée du lac sur un gros galion aux couleurs flashy du plus kitsch effet , surtout avec son pirate de pacotille , qui est là pour la photo, mais ressemble étrangement par son comportement et son look au Félix du « Père Noël », avec ses lunettes , sa fausse barbe miteuse, et son costume trop grand .
La balade est bien jolie , mais du Mont Fuji , on arrive seulement à en distinguer les vagues contours quand les nuages de son sommet veulent bien le quitter .
A bon port , on visite notre premier jardin japonais ( à Tokyo c'était plus des parcs ) , celui d'une ancienne demeure impériale en bord de lac , sous un magnifique ciel azuré .
Et là , le choc devant tant de beautés , devant ce décor de la Nature façonnée par la main de l'homme . Donc plus vraiment la Nature non plus . Un art extrêmement ingénieux de paysagiste et de botaniste . Je ne m'en lasserai jamais . Certainement que le côté torturé des arbres pourrait en choquer certains . Au final ce décor est toujours reposant pour l'esprit , et c'est son but .
Enfin , une promenade le long de ce qui reste de l'ancienne voie principale d'accès à Tokyo avec ses rangées de cèdres centenaires , puis un beau sanctuaire shinto , avec son grand tori vermillon ( porte) comme posé sur l'eau .
Ayant pratiquement fait le Tour du coin avec nos jambes de 30 ans en une grande journée , nous repartons dès le lendemain matin pour Tokyo , facilement rappelés par les Lumières de la Ville .